Nous avons passé un mois en Turquie. Contrastes, impressions variées, belles rencontres et petites aventures ont nourri ces dernières semaines. Voici un résumé de nos souvenirs et expériences.
Villes
Nous ne sommes pas de fervents amateurs des villes. Cependant, nous en traversons certaines avec plaisir et d’autres par nécessité. Quelques-unes nous marquent, d’autres nous laissent peu de traces.
Bodrum en bord de mer est un petit bourg de maison blanchie à la chaux, avec une grande marina, du calme et de la tranquillité hors saison. Nous y avons trouvé une laverie bon marché et bien pratique. L’ambiance y est sereine, plutôt chic.
Fethiye ne nous a pas fait une grande impression : peu animée hors saison, nous ne nous sommes pas arrêtés. Nous y avons découvert en revanche les places de jeu sportives, dont les familles turques raffolent apparemment.
Kas
Peut-être est-ce dû à notre bivouac particulièrement réussi, mais nous avons aimé Kas, sa mer turquoise, ses îles et ses allures de côte bleue du sud de la France.
Antalya présente une vieille ville sans grand intérêt, par contre sa côte déchirée par les falaises abruptes et vertigineuses reste inoubliable et mérite clairement le coup d’œil.
Antakya (Antioche) nous a laissé la meilleure impression. Antioche a été rattachée à la Turquie après le protectorat français. Mais Antioche se sent arabe. On y parle un mélange d’arabe et de turc. On y évolue en douceur et la tolérance et l’ouverture sont des mots qui vivent dans cette ville. Les confessions les plus diverses cohabitent sans rivalité et l’intégration des cultures orientales et occidentales est particulièrement réussie. En quittant Antakya, Max et Loane ont dit : « si un jour on veut s’installer à quelque part, c’est ici qu’on veut venir. » Nous partageons ce coup de cœur.
Sur la route entre Bodrum et Kas
Sites et plages : des énergies
En Turquie, les sites archéologiques sont extrêmement nombreux et d’excellente qualité. Difficile donc de faire des choix. Nous avons par exemple fait l’impasse sur Efes pour visiter Priene à la place. C’est probablement un très mauvais choix. Certes le site de Priene est magnifique et ses environs sont accueillants, mais les cartes postales d’Efes nous laissent croire qu’on y trouve certains monuments en particulièrement bon état ! Nous avons néanmoins profité du théâtre antique et désert pour faire quelques jeux de théâtre d’improvisation en famille… le gardien s’en souvient encore !
A Dalyan, nous avons bivouaqué avec la vue sur les tombeaux lycéens « accrochés » à la montagne puis nous avons parcouru quelques kilomètres sur la plage de Isutzu, à quelques kilomètres de là. Etrange sensation de flotter en l’air sur cette plage, difficile de s’ancrer dans le sol.
Olympos : un site archéologique, une plage de galet et des gîtes qui accueillent les visiteurs estivaux dans des cabanes dans les arbres. En principe, tout pour plaire. Pourtant nous nous sommes sentis oppressés et nous avons détesté l’énergie de cet endroit. On avait l’impression de déranger les fantômes dans leurs ruines… très désagréable.
En revanche, la visite des chimères à quelques kilomètres de là fut enthousiasmante. Les chimères : des feux dans la roche. La légende raconte qu’un dragon est enterré ici et qu’il continue de souffler sa colère. Les scientifiques expliquent le phénomène par la présence du gaz méthane qui émane de la roche. En tout cas, c’est magique à la tombée de la nuit de voir tous ces petits feux qui ne s’éteignent jamais.
Le site le plus vaste que nous ayons visité est celui de Patara. Son théâtre, son arc de triomphe et son étendue ont récolté tous nos suffrages. Sans parler de la plage de sable fin, déserte et longue de 15 km. Magnifique endroit, plein de poésie et très dynamisant.
La Capadocce
On se réjouissait d’y aller. On l’attendait avec impatience…. Aujourd’hui, on sait pourquoi ! C’est tout simplement phénoménal ! Au mois de décembre, sans personne sur les sites, sans queue dans les églises et avec une lumière chaude et douce du matin au soir pratiquement, la Capadocce est un vrai régal. Le spectacle est hallucinant. Que l’on parle des cheminées de fées, des églises rupestres et leurs peintures ou des villes souterraines, c’est clair, la Capadocce est un miracle de notre planète. Le sol de cette région – le tuf – est un mélange de cendres et de boues rejetées par les volcans alentours. Suite à l’érosion importante de ce sol très friable, la région s’est déchiquetée ou a ondulé par endroits. De la roche plus dure protège certains cônes et leur donne cette forme particulière, comme couverts d’un chapeau.
Les églises rupestres laissent découvrir des peintures de plusieurs époques successives (du IIIè au XIIè S) dont l’état de conservation est ahurissant. Enfin, les grottes des villes souterraines de Derinkuyu et de Kayamakli servirent de grenier, de pièces supplémentaires, puis de cachettes aux habitants de ces maisons, avant d’être reliées entre elles et de former ces villes de 85 mètres de profondeur, avec parfois plus de 40 étages dont 8 sont accessibles aujourd’hui. Les Chrétiens y trouvèrent refuge, nos enfants un immense terrain de jeu ! Génial d’arpenter, pliés en deux, ces couloirs et tunnels puis d’entrer dans ces pièces immenses, entièrement creusées à la main avec quelques outils rudimentaires. Fascinant. On n’oubliera jamais la Capadocce… même si elle finira bien par disparaître un jour, en raison de l’érosion qui poursuit son travail…
Villages
Nous avons profité de nous arrêter parfois dans des petits villages, non situés sur la carte et parfois même sans nom. Inutile de dire l’effet de notre arrivée sur les habitants. Le plus souvent on nous demandait quel était notre problème et comment ils pouvaient nous aider : « avez-vous à manger ? une douche ? vous voulez venir au chaud ? … » Parfois, on nous a envoyé la police, qui a alors contrôlé nos papiers. Mais franchement, on a plutôt l’impression qu’ils ont nourri leur curiosité ! Cela dit, à Oemerköy, nous avons trouvé un interprète qui parlait allemand. Il nous a présenté le maire et l’imam, qui nous a fait visité « sa » mosquée. Accueil très chaleureux de tous les habitants du village. Nous aurions pu dormir dans n’importe quelle maison du village si nous l’avions souhaité.
Rencontres
Il est évident qu’on attend de ce voyage d’effecteur des rencontres, de nouer des liens, de découvrir des gens, des styles de vie. Pourtant parfois, nous ne sommes pas disponibles, parce que fatigués ou pas d’humeur. Pas toujours facile de trouver le bon équilibre, la juste attitude, entre ouverture et intimité. Chaque personne dans chaque village nous voit pour la première fois, lorsque nous arrivons après avoir traversé plusieurs villages, serrés plusieurs mains, bu de nombreux thé et lâché mille mercis avant de nous arrêter dans ce dernier village où nous passerons la nuit. Eux ne le savent pas. C’est normal.
Alors parmi ces personnes qu’on rencontre, il y a celles qui se tapent l’incruste lorsque les enfants passent leurs évaluations scolaires et qu’on aimerait rester tranquille. Et puis il y a celles qu’on ne veut plus quitter, après avoir passé 5 jours dans leur quartier à Antioche.
Une chose est sûre : les enfants sont incroyablement doués pour créer les liens. Sans aucun mot de turc ou d’arabe et avec trois d’anglais, ils ont organisé des jeux qui ne se terminent jamais. A 5, 8 ou 20 dans la cour, ils ont joué, simplement, avec le rire en guise de langage universel.
Nous avons pris le thé chez Iskender et sa femme et Max a fait une battle de break avec leur fils Utku dans le salon… Nous avons pris le petit déjeûner chez un autre, francophone. Puis le souper, chez Fehmi, Muh, Suygi, Ekin, Ilkay et Ezgi. Un repas authentique. Des rires authentiques. Une famille fabuleuse qui nous a arraché nos premières larmes depuis le départ, au moment de les quitter. Sam conserve précieusement l’écharpe que Suygi lui a offerte. Retrouvez ces familles dans notre rubrique rencontres.
Aventures
Qui dit voyage, dit aussi aventure et même si nous sommes particulièrement prudents, il est des moments où l’on a serré les dents. A Dalyan, par exemple, lors d’un simple demi-tour, Thierry a réussi a embourbé Casita profondément (Véro avait pourtant dit : « pas bonne idée… »). Un tracteur nous a sorti de là, non sans casser sa corde de remorquage !
Un matin, les enfants du village nous ont poussés pour sortir du gravier et de la boue dans laquelle on enfonçait sans en sortir… Et puis, il y a eu la route de Yayahil à Feke… Une route de montagne. Nous voulions éviter les cols en trop haute altitude pour ne pas rencontrer de neige. Sur la carte, cette route semblait idéale, puisque le col le plus haut culminait à … 950 mètres ! Non seulement nous serons montés jusqu’à 2000m, mais en plus nous aurons connu notre première vraie piste, étroite, sinueuse, par moments boueuse à souhait et souvent donnant l’impression de n’arriver nulle part… Le paysage fut beau, mais on ne l’a pas beaucoup apprécié. En tout cas pas au volant, ni à côté. A l’arrière, par contre, Max a dit : « ça c’est le tour du monde !... » et Sam, absorbé par son jeu : « où ? quelle route ? »…
Clins d’œil
En Turquie, nous avons vu aussi :
- des chiens errants, par centaines. Ils sont dans les villes, dans les villages, calmes et inoffensifs, apparemment organisés. Ces chiens ont des attitudes quasi humaines entre eux et nous avons pensé aux créateurs de Disney en les observant à notre tour…
- le geste de la main qui en Italien veut dire che ? ou cosà dice ? signifie ici : beau, bien, bon, merveilleux, excellent, pico bello, etc.
- les places de jeu sont un concept hybride entre nos pistes vita suisses et le fitness en plein air. A tout âge on s’y défoule et s’amuse de bon cœur.
- Mustafa Kemal Atatürk : nous l’avons vu en photo seulement, puisqu’il est mort en 1938, après avoir conduit la Turquie sur le chemin de la laïcisation de l’Etat, du respect des droits de l’homme et de la modernité entre 1923 et 1936. Cet homme a notamment interdit le port du voile dans les écoles et œuvré pour l’égalité des sexes, notamment en introduisant le droit de vote pour les femmes en 1930 déjà ! Pour mémoire, en Suisse cela ne date que de 1974…
- Allemand : depuis le début de notre voyage, l’allemand est la langue qui nous rend le plus service et qui nous permet le plus d’échanges… étonnant, on s’attendait à l’anglais.
Vie à bord
Organisation
Nous avons décidé d’assouplir notre organisation scolaire. En effet, avec les journées d’hiver courtes, nous avions tendance à courir après le temps : école jusqu’à 12h, repas, 2 heures de route et voilà qu’il était temps de s’arrêter, sans n’avoir rien vu. Actuellement, nous nous laissons donc la possibilité de faire l’école entre 17h et 19h, ce qui nous permet de rouler ou de visiter les lieux en matinée et de profiter de l’après-midi pour nous détendre, jouer ou faire ce que nous avons à faire.
Conduite
La conduite en orient reste sportive et palpitante. S’il est vrai que sans klaxon, on s’arrête sur le bord de la route, on ne peut pas en dire autant des phares… Certains les allument, d’autres pas. Dans les villes, trouver une place de parc de 8m reste un défi difficile à relever, tout comme circuler dans des ruelles minuscules et encombrées de voitures arrêtées n’importe où… pardon stationnées ! Alors pour ne pas perdre la main et le rythme, nous avons opté pour une alternance au volant, un jour Véro, un jour Thierry.
Calendrier de l’avant
Nous n’avons pas de calendrier de l’avant… Cependant nous avons instauré un système de « surprises » familiales pour chaque jour du mois de décembre : à tour de rôle, chacun de nous 6 organise une petite surprise pour toute la famille. Très chouette à vivre. Nous citerons la surprise de Zoé qui est allée en ville avec Véro choisir les ingrédients pour préparer le soir, avec l’aide de Max, des « spadequi » aux oignons. Excellents.
Voilà. Actuellement nous sommes en Jordanie. Nous vous en parlerons la prochaine fois. Nous vous souhaitons à tous un très joyeux Noël et de très belles fêtes de fin d’année. Nous ne savons pas où nous passerons Noël et la fin de l’année, mais une chose est sûre… vous serez dans nos cœurs.