Histoires de barges
Pour se rendre, en véhicule, au Soudan depuis l’Egypte, en regardant une carte, on se dit qu’on a deux possibilités : soit longer la mer rouge jusqu’à Port Soudan, soit longer le lac Nasser. C’est vrai, sur la carte. Pas sur le terrain. Ces routes sont fermées en raison d’un conflit latent entre les deux pays. Du coup, le seul passage autorisé se trouve sur le lac Nasser ! Notons au passage que même si les relations entre le Soudan et l’Egypte se détendent, il est peu probable que la situation change. La famille propriétaire de la compagnie de transport sur le lac Nasser est très influente au Soudan et ne laissera probablement pas s’envoler la manne financière que représente ce système ridicule de bateau, à moins, c’est une piste que je suggère au président soudanais, de privatiser la route flambant neuve qui longe la mer rouge et de l’offrir à cette même famille en l’autorisant à y placer un péage…
En l’état, il faut prendre un bateau, enfin deux, un pour les passagers et un pour les véhicules. C’est barge ! Ce qui est barge aussi, c’est les tarifs ! (Voir infos pratiques). Alors pourprendre le large, nous avons dû prendre la grande barge, c’est à dire la large, celle qui accueille les grands véhicules comme le nôtre. Mais pour faire monter notre immense cageot, sur ce mini cargo, nous n’avons pas pu compter sur l’aide des barjos du port. Ils créent un angle si aigu entre la rampe d’accès à la barge et celle de la barge, que l’on en oublie que c’est un angle large. Ca frotte partout. On a fini le pare-choc planté dans le sol et une roue au-dessus de l’eau. Heureusement Dietmar et Franck nous ont aidés et sortis de ce mauvais pas.
Parce que les barges du coin, pour faire monter le véhicule sur la barge, ils n’hésitent pas à couper le cul du véhicule et à tout mettre dans la cellule en disant : « vous fixerez tout ça au Soudan ! », c’est du moins ce dont se souvient Salah, l’employé qui vend les billets et qui fait ce qu’il peut pour aider les pauvres touristes pris au piège de ce système complètement…barge !
Une fois à bord du ferry pour les passagers, on s’est senti beaucoup moins seul qu’au moment d’embarquer Casita… C’est bondé ! Heureusement, nous avions prévu la tente pour les enfants. Nous avons déclenché un fou rire général lorsque nous l’avons dépliée sur le pont. Mais l’idée est géniale et les enfants ont très bien dormi, au chaud et à l’abri des passagers quiavancent à l’aveugle au milieu de la nuit. Véro et Thierry ont un peu souffert de la dureté du sol, mais pas du froid. Nous avions pris les sacs de couchages et les grosses vestes d’hiver. A 8 heures du matin, le ferry passe devant les temples d’Abou Simbel.
Soudan - Wadi Halfa : welcome in Africa !
Comme la barge qui transporte les véhicules ne navigue pas la nuit, Casita n’est arrivée à Wadi Halfa qu’un jour après nous. Cela nous a permis d’ouvrir à nouveau la tente… dans la chambre d’hôtel, cette fois-ci, pour permettre à Véro et Max de dormir en sécurité loin des araignées, puces et autres bébêtes qui devaient arpenter le sol et les matelas. On ne vous parle pas des sanitaires… Là, même les bébêtes n’y vont plus ! Bref, nous sommes en Afrique et franchement, nous avons bien aimé le confort spartiate mais authentique du lieu !
Les pistes du Nord Soudan
De Wadi Halfa à Dongola, la route longe le Nil et traverse des villages nubiens. Les paysages sont merveilleux, l’ambiance y est calme et sereine et les gens souriants et accueillants. Nous avons aimé nous arrêter dans ces villages après des kilomètres de pistes et de secousses. Leurs maisons sont sobres, mais très jolies et leurs portes richement décorées et peintes. La route quant à elle est en construction. Il y a donc de nombreux tronçons de pistes qui paraissent toujours beaucoup plus longs que les parties asphaltées. Ces pistes sont souvent très rocailleuses et accidentées. Parfois, il reste des bancs de sable à traverser. Nous nous sommes ensablés une fois, en raison d’un mauvais choix de piste. Après une heure de pelletage et 10 mètres de progression, nous avons accueilli avec notre plus généreux sourire le véhicule de chantier venu nous tirer d’affaire en quelques secondes. Ensuite, de Dongola à Khartoum, une route asphaltée toute neuve et construite par les chinois traverse les 560 km de désert.
Soudan : chaleurs diverses…
Outre le sable et la poussière, nous avons découvert la chaleur soudanaise… Les gens sont corrects, serviables, curieux et respectueux. Cela nous fait du bien. A Gadaref, nous recevons de nombreux « welcome in Soudan » qui nous rappellent la Jordanie par instants, même si finalement, à part Mahmoud et Nadja, nous n’avons eu que peu de contacts avec la population soudanaise. La chaleur humaine est renforcée par celle du climat. Nous avons eu 47°C le 24 février après-midi et 35°C le soir à minuit. Il paraît qu’en Europe il fait -9°C ! Ca fait 56°C de différence ! Enfin, nous avons quelques chaleurs une nuit, lorsque nous bivouaquions tranquillement à l’écart de la route, dans un cadre calme et serein. Sur le coup des 4 heures du matin, Véro a été réveillée par des sortes de chants, qui font penser à des cris de rassemblement tribaux. En regardant par la fenêtre, elle découvre la présence d’une section militaire d’une centaine de soldats, à 100 mètres de nous. Certains rôdent autour de Casita, d’autres hurlent et chantent autour d’un feu. Très peu rassurée sur les intentions de tout ce monde, elle n’a pas refermé l’oeil de la nuit. Au lever du soleil, tout ce monde a plié bagages et la troupe s’en est allée à pied derrière les camions en scandant des chants un peu inquiétants…